Avez-vous pris votre piolet ?... et de bonne chaussures ? Vous étiez pourtant prévenus : sous la conduite de Monsieur Töpffer, une excursion ne peut être que riche de péripéties, de détours et d'inventions. Car ce grand marcheur, écrivain et dessinateur par plaisir, nous a laissé aussi quelques portes théâtrales pour entrer en son monde de fantaisie.

Ainsi l'acte qui débute le spectacle fut intitulé par Töpffer "Les Qui pro quo". Ce titre à la fois clair et intriguant baptise aussi pour nous l'ensemble du spectacle, car le malentendu est un principe comique essentiel aux trois pièces présentées. La première déroule une suite étourdissante d'incidents dans un petit hôtel savoyard, hâvre qui n'est pas de tout repos pour les voyageurs qui s'y installent. Chaque incompréhension semble d'abord anodine, puis rebondit dans le couloir et aboutit avec une précision diabolique là où elle sera la plus nuisible. Les clients et leurs exigences cumulées n'ont bientôt plus d'autre recours que la fuite.

La deuxième pièce enchaîne avec un second hôtel, un peu plus haut perché que le précédent : à Saint-Gervais-les-Bains. Là, "Monsieur Briolet ou le dernier voyage d'un bourgeois" combine les vacances de représentants de deux nations : des Anglais à l'heure d'un romantique sacrifice matrimonial et une pétulante famille genevoise à l'hédonisme bon enfant. Avec deux mariages à la clé, comme il se doit.

Après l'entracte, la comédie de moeurs "Les Grimpions" propose un sujet si purement genevois qu'il en devient universel. Car les tactiques des arrivistes sont multiples, mais eux restent toujours les mêmes. Le terme suisse romand de "grimpion", si utile pour les désigner dans leur effort ascensionniste, entre d'ailleurs cette année dans le Dictionnaire de l'Académie française ! Töpffer aurait-il imaginé si belle pirouette de l'Histoire ?